martes, 22 de marzo de 2011

Le BBL à Sant Cugat: la promesse tenue de Gil Roman

"Nous les grecs, nous avons besoin[...] de nos Dieux. Ils sont là." Ainsi commence Dyonisos suite, la 1ere pièce au programme de cette soirée du 19 mars au Teatre Auditori de Sant Cugat.
En effet, difficile de ne pas penser aux dieux en voyant les danseurs et danseuses de la compagnie du Béjart Ballet Lausanne tant tout est parfait.
Je n'ai jamais eu la chance de voir Dyonisos dans son intégralité, qui à l'origine, occupait toute une soirée, et j'ai trouvé cette suite bien structurée.

Dyonisos
photo localpress

Tout commence dans une taverne et les personnages qui la peuplent: un homme grec, une femme grecque, une jeune fille (la très belle et talentueuse Oana Cojocaru), un anarchiste, 2 étudiants, etc. Tous ces personnages nous dansent tour à tour une partie de leur vie avant de laisser place aux Dieux et à Jupiter pour un pas de deux avec Seleme, la mortelle qui sera foudroyée par son amour divin. Julien Favreau et Katia Shalkina subliment ce pas. Lui est beau comme un dieu justement et elle danse divinement bien.
Le solo de Manoula mou était interprété par Daria Ivanova. Elle est un ange sur scène, c'est ce que je me suis immédiatement dit dans ma tête. Ma voisine derrière a eu cette même vision, mais à voix haute...Bon, je lui pardonne parce que ça sortait du coeur.
J'en ai eu des larmes aux yeux d'émotion, il faut dire que la musique et la chorégraphies sont particulièrement belles et émouvantes.
Les ensembles des filles sont bien réglés. La dynamique du groupe est impressionnante et transporte les spectateurs.

Dyonisos
photo localpress

Mais le must et le passage le plus attendu sans doute c'est la danse de groupe des garçons. Je ne crois pas que l'on puisse décrire avec des mots ce que j'ai vu samedi. Une telle prouesse me laisse sans voix. C'est ce que j'aime chez Béjart, cette virtuosité, cette performance qui n'est jamais gratuite. Celles et ceux qui me lisent régulièrement doivent savoir que je n'aime pas les performers et que passer 10 pirouettes me laisse de glace et même m'agace s'il n'y a aucune émotion, aucun sens artistique.
Chez Béjart, il y a surtout de la virtuosité et celle-ci est toujours au service de la Danse qui veut toujours dire quelque chose. La Danse de Béjart est un langage qui me touche en plein coeur.
C'est d'une beauté époustouflante, d'une perfection technique incroyable: les tours en l'air sont à tomber par terre (sans mauvais jeu de mot), les sauts puissants et parfaitement réceptionnés, les ensembles sont ensembles au milimètre prés.
J'ai été complètement hypnotisée.

Dyonisos
photo localpress

Tous les danseurs et danseuses mériteraient d'être cités. Oscar Chacon a été un magnifique Dyonisos tout au long du ballet, l'homme grec de Marco Merenda était toujours juste. J'ai également remarqué Dawid Kupinski, que j'avais repéré plusieurs fois lorsqu'il dansait à Copenhague, Juan Polido, Keisuke Nasuno, Lisa Cano, Luisa Diaz et bien sûr Oana Cojocaru.
Les costumes de Versace sont magnifiques, le jeu des lumières crée par Dominique Roman fonctionne à merveille et participe à "mettre en lumière", si je puis dire, l'ambiance du ballet.
Et puis cette impression bien présente que Béjart est là, en coulisses et qu'il va venir saluer. Ca peut paraitre incroyable mais je me suis vraiment imaginer le voir venir sur scène tant il était présent ce soir grâce au talent des danseurs et danseuses. C'était émotionnellement très fort.

A l'entracte je n'ai entendu que des louanges quant à cette 1ere partie de programme et, à peine remis-e-s de nos émotions, nous avons pu assister à la 2eme partie.
Celle-ci s'ouvre sur la Première mondiale de Song of Herself, pas de deux chorégraphié par Julio Arozarena, sur des musiques de Schubert (la Jeune Fille et la Mort) et de Dafnis Prieto et des costumes de Henri d'Avila.

Song of Herself
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Rien à voir avec Dyonisos, c'est un changement radical de style. Le propos se fait grave. La jeune fille (Kathleen Thielheim), d'abord face à elle-même lorsqu'elle se regarde dans le miroir, se retrouvera face à la mort, incarnée par le très séduisant Felipe Ferreira Rocha.
Le style est épuré, les décors minimalistes ce qui a pour effet de mettre la chorégraphie et les danseurs au centre de l'oeuvre et c'est réussi. Julio Arozarena signe ici une chorégraphie riche et soignée, esthétique.
J'ai beaucoup aimé les costumes. La robe colorée et fleurie de la jeune fille (en fleur?) tranche avec le costume uni blanc de la Mort. La robe me rappelle aussi les 4 saisons et le cycle de vie et de mort de la nature, la mort n'existe que pour permettre une renaissance.
Une pièce très intéressante à découvrir en attendant de nouvelles créations de Julio Arozarena.

La soirée de terminait avec Syncope de Gil Roman, crée en décembre dernier à Lausanne. Il s'agit d'une création à part entière puisque même la musique a été spécialement composée pour ce ballet.
Syncope
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Le rideau s'ouvre sur Dawid Kupinski puis Elisabeth Ros. Son chapeau me rappelle étrangement un abat-jour. Et pour cause! Elle est la lumière qui va accompagner et guider Dawid tout au long de ce voyage onirique.
Des personnages en blouses blanches me font immédiatement penser au monde médical, il envahissent la scène mais leur présence est dédramatisée par l'entrée d'autres personnages, des filles en tutus courts revisités, un oiseau. C'est tout un monde à la fois étrange et merveilleux qui s'offre à nos yeux.
Le trio dansé par Katia Shalkina, Oscar Chacon et Juan Jimenez est particulièrement réussi. La danse des garçons et l'oiseau de Daria Ivanova aussi. Il était d'ailleurs encore plus intéressant de voir la danse des garçons puisqu'il s'agissait d'un passage travaillé lors  de la répétition publique qui a eut lieu avant le spectacle. Ces garçons étaient donc ce soir-là Dawid Kupinski, Juan Jimenez, Oscar Chacon, Marco Merenda et Valentin Levalin.

Syncope
photo localpress

Ici aussi les costumes de Henri Davila sont réussis, agréables à l'oeil. La musique est variée allant même jusqu'à reprendre du Chopin. Mais ce mélange de style n'est pas du tout choquant, au contraire tout se fait avec harmonie et surtout logique par rapport au déroulement de l'oeuvre.
La seule chose que je n'ai pas aimé du tout c'est le coup du cigare sur scène. Je ne vois pas ce que ça apporte.
Au final il s'agit d'une oeuvre poétique, merveilleuse (à tous les sens du terme), extrêmement riche. Il faudra que je la revois pour mieux la cerner car si j'ai ressenti de nombreuses émotions en la voyant cette première fois, je suis sûre d'être passée à coté d'un million de petites choses.
Bien sûr maintenant je rêve de voir Aria.

Une fort belle soirée qui se classe parmi mes meilleures soirées de spectacle. Une soirée dont Béjart peut être fier.
Gil Roman et l'ensemble des artistes du BBL ont prouvé que la compagnie est toujours au plus haut niveau 3 ans après la disparition de Maurice Béjart.
Dans le Coeur et le Courage, Gil Roman dit avoir promis de maintenir l'oeuvre de Béjart au top niveau et de donner de la nourriture aux danseurs. Promesse très largement tenue!  D'ailleurs je n'ai jamais pu imaginer qu'il puisse en être autrement.
Merci au Teatre Auditori de Sant Cugat d'avoir programmé le BBL! Et merci à Sant Cugat d'apporter son soutien au BBL.

La tournée du BBL continue:
Alcobendas,  le 22 mars 2011: Elton-Berg / Tristan et Yseult / Etude pour une dame aux camélias / Le chant du compagnon errant / Song of Herself / L’Oiseau de feu
Valladolid, les 25, 26, 27 mars 2011: Aria / Dionysos (suite)
Rouen, France – Zénith le 30 mars 2011: Aria / Dionysos (suite)

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